mardi 6 septembre 2016

« Vous qui passez sans me voir... »





© Dominique Hasselmann





« Vous qui passez sans me voir... »


Dans la lumière humide d'avril,
il passe, il ne me voit pas
de toute façon, il ne me regarderait pas
il détournerait les yeux.
Il fixe sa tablette tout en marchant,
il se croit connecté…
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Aujourd'hui, moi, j'ai déconnecté,
je suis resté sous la tente,
fragile esquif au cœur de la ville,
bulle où commence la contrée nommée exclusion,
il ne veut pas en franchir la frontière,
ne serait-ce que d'un regard…
Je suis l'incarnation de ses pires craintes.
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A louer, la pancarte est là depuis des semaines...
Quelqu'un s'est-il dit une seule fois :
celui qui est assis sur le seuil,
celui qui est allongé sous la tente,
d'autres aussi
pourraient y trouver un abri de fortune.
C'est sûrement pas chauffé
mais au moins, ils auraient un toit sur la tête…
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N'ont-t-ils pas plutôt pensé
Allez wake up, bouge-toi feignasse
T'as deux bras, deux jambes...
Je suis une vie qui ne compte pas,
pas même une ombre de la rue.
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Je suis le spectateur de leurs vies,
nos quotidiens sont deux mondes même pas parallèles...
Je ne suis pas l'invisible,
je suis l'invu, l'inregardé.
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Ce texte a été publié pour la première fois sur « Métronomiques », le blog de Dominique Hasselmann, dans le cadre des Vases Communicants de mai 2016.



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